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  • Quentin A.

Un Nuage entre les dents : grand reporter en proche banlieue...

Dernière mise à jour : 23 nov. 2020

Malisard et Prévot sont deux journalistes au « Soir de Paris », ensemble ils courent la capitale et ses faits divers, des cambriolages aux glissements de terrain en passant par les accidents de la circulation. Alors qu’ils couvrent une explosion au gaz dans un immeuble après avoir récupéré les deux enfants de Prévot à l’école, ils s’aperçoivent que ceux-ci ont disparu dans l’agitation de la catastrophe. Pensant à un enlèvement ils partent à leur recherche. Pendant ce temps, leur rédaction prépare l’édition du soir avec en une ce terrifiant « kidnapping ».



Premier film de Marco Pico (assistant d’Yves Robert depuis Bébert et l’omnibus), Un nuage entre les dents est un coup de force à l’énergie folle porté par un duo d’acteurs au sommet de leur gloire. Philippe Noiret (Malisard) et Pierre Richard (Prévot) sortant respectivement de La grande bouffe et du Grand Blond trouvent ici parfaite matière à leur talent, composant un duo de journalistes violents, grandes gueules et alcooliques patentés, arpentant Paris à 100 à l’heure dans une 403 déglinguée pour couvrir tout ce que la capitale compte d'événements sordides et sensationnels. Avec Noiret en placide reporter de banlieue, et Richard en paparazzi jouant des coudes pour obtenir les clichés les plus frais, les plus sanglants, les « cowboys » passent leur temps entre la voiture et les bistrots où ils s'arrêtent constamment pour faire le plein de pastis et communiquer les dernières nouvelles à leur rédaction.



Cette rédaction du « Soir de Paris » c’est l’autre aspect aussi délirant que précurseur que Pico nous donne à voir du journalisme parisien, et aussi peut-être le versant le plus baroque et surréaliste de son film, trouvant dans cet espace clos, bavard, le terrain d’un comique absurde et cynique avec une équipe de journalistes en frénésie de nouvelles sensationnelles (les apparitions récurrentes de Jacques Denis à la porte de son rédacteur en chef pour lui rapporter les dernières nouvelles des « cowboys » sont à pleurer de rire) et un directeur du journal incarné par un hilarant Claude Piéplu, obsédé par son tirage et haranguant son équipe par des grandes phrases (« Le lecteur, il est humain... c’est un être humain » - « Pas de Politique ! Tout sur les Sadiques ! »).



Enfin, malgré ces récurrentes et réjouissantes incursions dans la salle de rédaction, Un nuage entre les dents est surtout un film en mouvement constant admirablement bien filmé, qui passe son temps entre l’intérieur de la voiture des cowboys et celui des chambres de bonnes, des épiceries, des cafés et des cabarets d’un Paris en chantier (le film est principalement tourné dans les 19ème et 20ème arrondissements en pleine démolition au moment du tournage) donnant au long métrage un aspect unique par ses plans très resserrés en 50mm pour les scènes d’intérieur ou de foules, et offrant aux spectateurs une incursion dans la nuit de Paris et sa banlieue magnifiquement éclairée (il faut voir cette rencontre nocturne des cowboys avec un éléphant échappé d’un cirque, errant en pleine rue à la lumière des lampadaires).



Dans une année 1974 qui aura vu sortir au cinéma d’autres beaux films en mouvement (notamment Les Valseuses de Bertrand Blier, ou L'Horloger de Saint-Paul de Bertrand Tavernier avec Philippe Noiret), Un nuage entre les dents n’eut pas le succès qu’on aurait pu lui promettre et que son réalisateur et scénariste aurait largement mérité. Mais le film a bénéficié en 2016 d’une magnifique restauration HD et d’une édition blu-ray chez Gaumont Découverte. Si vous aimez l’humour baroque, les acteurs qui s’engueulent, le pastis et les nuages de fumée, essayez donc celui de Marco Pico, il est réjouissant.

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