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  • Manon Ruffel

Miyu, l'animation au plus près des artistes

Vous aurez peut-être vu passer le dessin d'une paire de fesses orange sur un fond parme dans le programme du mois au Zola. Ne paniquez pas, c’est simplement la superbe affiche de Plan-cul la Praline (designée par nos talentueux confrères lyonnais Kiblind), un programme de 7 courts métrages d’animation autour de l’amour et de la sexualité. Délicieusement concocté par Miyu Distribution, ce florilège érotique vous emmène dans un voyage à la fois doux et épicé, beau et violent. Luce Grosjean, qui viendra présenter la séance le 23 octobre à 20h45, nous en dit un peu plus sur ce bel objet, et plus généralement sur le travail de Miyu.


 

Quelle est l’histoire derrière Miyu ?

Il y a deux volets qui composent Miyu. La partie production, créée il y a plus de 10 ans par Emmanuel-Alain Raynal, qui a développé à travers Miyu une vraie expertise en production de courts métrages d’animation, et dernièrement de séries et longs métrages. Il y a une identité très forte, celle du court-métrage d’animation, très souvent en co-production internationale. D’ailleurs depuis peu, un lien se dessine de plus en plus avec le Japon, avec trois films en co-production japonaise qui vont être lancés. De mon côté, j’ai créé Sève Films, une société de diffusion de films issus d’écoles d’animation. Je faisais un peu de production, mais je ne savais pas vraiment comment faire évoluer la société. Sève Films est devenu Miyu Distribution lorsque j’ai rencontré Emmanuel-Alain, formant ainsi le deuxième volet de Miyu. Ils apportent toute la structuration pour aider à la fabrication des films, moi je mets en place des stratégies pour que les films voyagent en festival.



Comment se passe la diffusion en festival justement ?

C’est propre à chaque film. On ne travaille pas de la même manière avec un film d’animation grand public, qu’avec un film plus pointu, plus arty. Les festivals permettent d’ouvrir des portes financières, comme les chaînes de télévision par exemple (Canal+, Arte…). Notre manière de travailler est basée sur une prise de risque : on engage des frais, on fait en sorte que les artistes puissent développer leur projet, puis on se rembourse s’il y a des recettes. Ce modèle apporte une vraie flexibilité et une vraie liberté. Le parcours traditionnel de nos films, c’est d’aller d’abord en festival, puis parfois il y a une diffusion télévisée, ensuite les films peuvent continuer d’être loués, puis mis en ligne. Notre travail, c’est de chercher comment on peut rendre nos films plus facilement exploitables pour les salles de cinéma, mais aussi plus visibles auprès du public. C’était l’un des objectifs de Plan-cul la Praline d’ailleurs.



Comment travaillez-vous avec les artistes ? Comment les dénichez-vous ?

On fait une veille des talents qui sortent d’école d'animation. On essaye de se rapprocher de ces écoles-là, c’est d’ailleurs pour ça que Miyu a développé trois autres studios en dehors de Paris, à Angoulême, Valence et Arles. Emmanuel avait très envie de travailler avec des artistes d’Angoulême par exemple, donc on a développé un studio autour d’eux directement sur place. On a envie de maximiser leur savoir-faire, d’aller chercher leur technique sur des projets précis, et aussi de leur proposer de travailler pour d’autres prestations ponctuelles. Pareil, pour Valence, le studio s’est construit autour de l’artiste Osman Cerfon.





Finalement, c’est presque la démarche inverse que celle qu’on pourrait imaginer, selon laquelle les artistes viendraient à vous. Là, au contraire, vous allez vers les artistes…

Oui, c’est très important pour Emmanuel de ne pas imposer un espace de création, de s’adapter aux projets des artistes. Ça participe également d’une logique financière : se développer en région, ça enrichit l’écosystème local, ça fait découvrir de nouveaux artistes, etc… On essaye de manière générale d’être au service des artistes, et pas simplement d’appliquer une recette qui marche et qui fait de l’argent.



Quelles sont les valeurs que vous souhaitez défendre à travers les différents projets que vous produisez et que vous accompagnez ?

L’exigence graphique, en premier lieu. On veut avant tout défendre le beau, le fait d'être entouré de belles images, et surtout transmettre cette capacité de faire de l’animation proche du roman graphique, avec une approche plus plastique et peut-être moins narrative parfois. Au niveau distribution, on va parfois avoir plus de liberté, et parfois on va diffuser un film qui ne nous plait pas forcément mais qui transmet quelque chose d’intéressant. Mais de manière générale, on essaye de s’inscrire dans des valeurs féministes, on a envie de travailler de la manière la plus inclusive possible. Dans la diffusion, on a un réel impact sur le public. Parfois, on va proposer un film qui n’est pas forcément dans nos valeurs, ou qui peut avoir des aspects problématiques avec lesquels on n’est pas forcément d’accord, mais sur lesquels on souhaite apporter une vision critique. On veut que les films dérangent, ou amènent à se poser des questions, à ouvrir une conversation. Oui, c’est problématique, mais pourquoi ? Le programme Plan-cul la Praline, en cela, ouvre la discussion. Le cinéma doit être un lieu d’échange et de débats.



"Le cinéma doit être un lieu d'échange et de débats."


Vous produisez également des clips musicaux, qu’est-ce que ce format permet que le court-métrage ne permet pas ?

Un clip, on n’est pas censé le distribuer parce que souvent, on n’a pas les droits. Les ayant droit nous payent en tant que prestation de service pour continuer d’accompagner l’artiste, pour faire voyager le clip ailleurs. Ainsi, on va proposer des clips dans des festivals. On s’est rendu compte qu’il y avait une vraie fenêtre, celle de l’avant-séance. De plus en plus de salles ont envie de diffuser un court-métrage ou un clip avant un film. Un clip, c’est dynamique, c’est court, c’est un voyage très dense et intense.



Parlez-nous un peu plus de Plan-cul la praline

Les programmes de courts métrages, ça fonctionne bien en général. J’ai toujours rêvé d’en faire un, mais cela demandait des frais que je ne pouvais pas supporter. On a reçu en 2019 le Prix de l’Export d’UniFrance et l’AFCA (Association Française du Cinéma d’Animation), ça nous a permis de développer des projets comme celui-ci. On s’est demandé si on faisait plutôt un programme grand public, mais qui ne ressemble pas à notre catalogue, ou si on allait vers quelque chose de plus arty, qui nous ressemble plus. On a essayé d’assembler des films qu’on aimait, pour avoir une séance qui soit facile à absorber. On voulait que l’expérience soit forte mais que les gens soit contents d’avoir payé leur place. Mon idée c’était de le construire comme un menu de dégustation : on commence avec un film plutôt facile, drôle, et petit à petit on voulait emmener le spectateur dans des recoins où ils ne savaient même pas qu’il voulait aller. Plan-cul la praline, c’est une expérience intense, tout en montagne russe. Le titre est à l’image du film : ils regroupent un côté explicite et un côté trash. C’était une inspiration du titre de la BD Plan plan cul cul d’Anouk Ricard. On voulait jouer avec le contraste entre le côté doux de l’animation et le côté sulfureux du sexe. Pour l’affiche et l’identité graphique, on a travaillé avec Kiblind. On est allés chercher des personnes avec qui on a un ADN commun, des valeurs communes.




C’est quoi, le futur de Miyu Distribution ?

On a signé nos premiers longs métrages. Ce sont de nouvelles questions, de nouveaux challenges. Après avoir beaucoup travaillé avec les festivals, notre objectif c’est d’aller chercher le public ailleurs. On va essayer de diffuser des choses pas faciles, pour que notre public aille voir des choses qu’il n’a pas l’habitude de voir. Il y a aussi un nouveau lieu qui va ouvrir, une galerie, qui permettra d’exposer les œuvres issues de la production Miyu.



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