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  • Mathilde

pavel kloushantsev : le RêVEUR Des toiles

Cette semaine, sortez des sièges confortables du Zola pour revêtir votre plus belle combinaison spatiale. La Planète des Tempêtes (Planeta Bur) de Pavel Kloushantsev sort en 1962 sur les gravats de la Guerre Froide, influençant son contexte de fabrication et ses aspirations cosmiques.


Qui de mieux pour vous parler de ce film que l'équipe des Intergalactiques,

dans le cadre de leur Soviet’SF festival

du 8 au 14 novembre sur Twitch et dans notre salle.


Cette séance noue également un partenariat avec le Pôle PIXEL,

en résonance avec l’exposition Effets spéciaux, crevez l’écran ! ouverte au public et logée au Studio 24 jusqu’au 27 mars 2022.


En 1960 la science-fiction accomplit sa mission, mettant en images un futur animé par la curiosité des territoires inexplorés et l’étendue des limites de l’imaginaire. Pavel Kloushantsev naît et grandit à Léningrad, une ville sous l’emprise du régime autoritaire soviétique. Ce milieu oppressant lui permet de nourrir une idée, celle d’un échappatoire. Kloushantsev place progressivement l’intensité de sa croyance en ce chemin incertain dans le réalisme et la précision scientifique de ses films.


« Je veux créer une utopie, le rêve d’un monde futur avec une société chaleureuse et une nouvelle race d’hommes. »

Pavel Kloushantsev, Le Rêveur d'Étoiles, Arte, 2002


Son journal, qu’il enrichit d’annotations rebelles envers le régime et sa soif de découvertes, devient presque le scénario de ses futures réalisations. Cependant, au début de sa carrière Pavel Kloushantsev réalise des films de propagande, vantant les mérites de l’armée de l’union soviétique.


Il tente de se défaire peu à peu de cette image servile en intégrant le studio des films documentaires et scientifiques (Lennauchfilms) de Léningrad. Là-bas, il met à profusion ses connaissances et son intérêt pour l’espace. Cette opportunité lui donne l’occasion de réaliser plus d’une centaine de films sur ces sujets. Profitant de l'assujettissement des avancées technologiques à des intentions de campagne pour le régime soviétique, Kloushantsev sort l’un des films les plus marquants de sa carrière, Le Chemin des étoiles en 1957. Les préoccupations cinématographiques du réalisateur sont alors intimement liées aux hostilités entre les deux blocs. Spoutnik 1, premier satellite, est lancé le 4 octobre de la même année.


Profitant de cette impulsion historique, La Planète des Tempêtes, nouvel engin soviétique apparaît sur les écrans en 1962. Pavel Kloushantsev expérimente de nouveaux effets visuels, ne rougissant en rien de leurs aspects, en apparence, rudimentaires. Les prouesses techniques de chaque côté du rideau de fer se retrouvent à l’échelle de l’industrie cinématographique. Apprécié en Russie, le film est diffusé dans 28 pays et rencontre 28 millions de spectateurs. L'accueil que lui réservent les États-Unis diffère avec l'enthousiasme général. Passé au crible, remanié, le film est filtré par le soft power américain :


« Trois vaisseaux spatiaux soviétiques quittent l'URSS pour Vénus. À proximité de la planète l'un d'entre eux est détruit, mais les deux autres décident de poursuivre la mission. Une femme reste en orbite alors que cinq hommes et un robot descendent et explorent cette terre hostile, à la recherche de vie extraterrestre et de la source des étranges chants qu'ils entendent. »


L'œuvre de Pavel Kloushantsev connaît même deux "adaptations" aux États-Unis. La seconde, en 1968, est mise au point par Roger Corman. Emblème américain du cinéma de série B, il achète les droits du film pour une somme dérisoire. Les coupes et les plans retournés justifient pour lui l’écartement pur et simple du nom de Kloushantsev. Certains personnages sont calqués par des acteurs américains. Vénus n’est plus seulement peuplée par de sympathiques dinosaures ou plantes tentaculaires mais s’agrémente des courbes de Mamie Von Doren, sex-symbol des années 50. La cosmonaute Masha, interprétée par Kiounna Ignatova est remplacée par des arguments plus lucratifs. Légèrement éloigné de sa trajectoire de départ, La Planète des Tempêtes devient Voyage to the Planet of Prehistoric Women, réalisé par Peter Bogdanovich.


Tout comme l’exposition Effets spéciaux, crevez l’écran ! qui s’attache à décortiquer la fabrication des effets spéciaux et leur intégration dans le scénario, revenons quelques années en arrière dans les coulisses de La Planète des Tempêtes.

Kloushantsev insiste sur le croisement entre les images en prise de vues réelles avec des effets visuels.

La Planète des Tempêtes, Le Rêveur d'Étoiles, Arte

Les premières images d’apesanteur sont permises par une installation gigantesque pour l’époque. Une cage en forme de roue tournoie doucement pour laisser le réalisateur, installé dans ce dispositif assis sur une chaise , suivre ses mouvements en synchronicité.


La Planète des Tempêtes, Le Rêveur d'Étoiles, Arte

La prise de vue verticale est employée pour insister sur cette réalité scientifique : “Les acteurs sont suspendus au plafond du studio tandis que l’équipe de tournage se situe en dessous”. Ainsi, les câbles qui les relient sont dissimulés par cet angle de vue et leurs corps.


La Planète des Tempêtes, Artus Films

Une autre scène du film, sous marine, cache, elle aussi, d’autres secrets de fabrication. La plateau de tournage est enfumé pour simuler les mouvements aquatiques. De fins réservoirs d’eau avec des poissons sont placés devant la caméra pour laisser croire à cette plongée dans les fonds marins. Enfin, un autre réservoir d’eau, suspendu au-dessus du plateau, est traversé par un faisceau lumineux et reflète les irisations de l’eau.


Peu importe les décors et les péripéties, ce qui compte pour le réalisateur soviétique est la création d’une illusion. Elle permet l’immersion du spectateur dans cet univers où tout reste à explorer, sans pour autant sacrifier la part de véracité et d’exactitude de la science.


Pavel Kloushantsev pave progressivement son chemin vers les étoiles et est reconnu, à l’heure actuelle, comme l’un des pionniers des effets spéciaux du cinéma soviétique.

Lui-même s’inspirait de certaines techniques plastiques du cinéma américain et devient une figure d’inspiration pour ses successeurs de l’autre côté du globe. Kubrick reprend notamment de son « effet d’apesanteur » pour 2001, l’Odyssée de l’espace.


Le film ressort au cinéma le Zola le dimanche 14 novembre à 18h45.

Pour réserver vos places, rendez-vous ici.


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